Herbby Jean-Jacques partage sa passion et ses connaissances sur le basketball, les sneakers, la culture Hip Hop et l’art en tant que consultant, curateur événementiel, rédacteur et créateur de contenu. Ce « sneaker connoisseur » a réalisé une collaboration Nike By You en 2020 : une Air Max 1 aux couleurs du madras [tissu à carreaux traditionnel antillais, ndlr], fièrement intitulée Culture & Diversité. Aujourd’hui, Culture & Diversité devient un livre mais avant d’en parler, découvrons d’abord qui est Herbby !
CULTURE HIP HOP
Bonjour Herbby, peux-tu te présenter en quelques mots ?
Bonjour Mayleen ! Déjà, merci à toi et à T-Rexmagazine pour votre travail de valorisation de notre belle culture Hip Hop. Ensuite, pour ne pas répéter mon statut professionnel que vous avez bien mentionné dans la bio, je me définirai comme un artiste et entrepreneur guadeloupéen qui travaille en faveur de la Culture avec un grand C.
Comment s’est faite ta rencontre avec la culture Hip Hop ?
Ma rencontre avec la culture Hip Hop s’est faite dès ma naissance, grâce à mon prénom. Mes parents ont décidé de m’appeler Herbby en hommage au jazzman de référence Herbie Hancock qui a joué un rôle important dans l’histoire de la musique et du Hip Hop. En 1983, dix ans après la naissance de cette culture, il sort le son et le clip Rockit qui jouissent de fortes influences Hip Hop dont les scratches de DJ. À l’époque, Herbie Hancock est déjà une référence dans le jazz et il est le premier artiste « non Hip Hop » de renommée à mettre en avant cette culture émergente à l’échelle planétaire ! Mais ça, je l’ai appris bien plus tard…
Qu’est-ce que le Hip Hop représentait pour toi ? Comment vivais-tu cette culture ?
J’ai vraiment découvert le Hip Hop fin des années 90, début 2000 via des grands de ma ville, à commencer par leur style vestimentaire : maillots de basket très larges, Fitted Cap New Era, baggys, Air Force 1 Mid et Low … et la musique qu’ils écoutaient : énormément de Jay-Z et d’autres artistes new-yorkais comme Talib Kweli ou encore Nas. À l’époque, je vivais cette culture via la musique et en jouant quotidiennement au basket-ball. Mon meilleur pote et moi étions fascinés par les clips et je me suis pris d’amour pour le basket-ball après avoir vu Space Jam au cinéma en 1997.
Est-ce que tu pratiquais une des 4 disciplines artistiques du Hip Hop ?
J’ai grandi à Noisiel, en Seine-et-Marne, terre du crew de danse mythique : le Wanted Posse. J’allais les voir danser dans une salle de la ville qui s’appelait le Verger et c’est comme ça que j’ai commencé la danse. J’en ai fait durant quelques années puis j’ai arrêté.
Que penses-tu de la séparation des différentes disciplines du Hip Hop ? Pourquoi cet éloignement à ton avis ?
J’aurais aimé voir plus d’unité au sein des différentes disciplines du Hip Hop mais qui dit spécialisation dit éloignement. Ce n’est pas donné à tout le monde d’être polyvalent mais si on est passionné, on doit faire en sorte d’être actif dans chaque art qui nous parle, sans s’imposer de limites.
Et toi tu t’intéresses encore à ces disciplines ?
Je m’intéresse et je suis fortement inspiré par un grand nombre d’artistes Hip Hop : Nas, Kendrick Lamar, J. Cole, Alpha Wann et Damso pour le rap, MaMSoN du Wanted Posse pour la danse, DJ Jazzy Jeff pour le DJing… Je suis moins familier avec l’univers du graffiti mais j’apprécie le travail de l’artiste Tempo Nok.
Au vu de son évolution, avec une forte présence du rap au détriment des autres disciplines, est-ce que tu penses que l’« esprit Hip Hop » existe toujours ?
L’esprit Hip Hop existe toujours mais il n’est pas forcément médiatisé à grande échelle. Il y a encore beaucoup de protagonistes, à titre individuel et collectif, qui font ce travail de valorisation de l’esprit Hip Hop à l’échelle locale et internationale, et T-Rexmagazine en fait partie donc merci à vous !
CULTURE SNEAKERS
Merci à toi aussi ! On va passer aux sneakers maintenant , tu étais déjà fan à cette époque ?
Tout comme le basket-ball, je dirais que j’ai découvert l’univers des sneakers grâce à Space Jam en 1997, même si je ne m’en étais pas rendu compte à l’époque. J’ai vraiment commencé à apprécier les baskets au début des années 2000, en regardant les paires aux pieds des joueurs durant les matchs NBA diffusés sur Canal + : Allen Iverson, Kobe Bryant, Tracy McGrady…
Tu te souviens de ta première paire ? Tu choisirais laquelle maintenant ?
Ma première paire était une Air Force 1 Low avec l’empeigne [dessus de la chaussure, ndlr] en tissu bleu, la semelle et les swoosh latéraux blancs. C’est drôle car j’achète très peu de paires aujourd’hui mais mes dernières acquisitions sont aussi des AF1 dont la réédition de la Linen, sortie le 13 juin 2024.
Pour toi qu’elle est LA sneaker emblématique de la culture Hip Hop ?
Pour moi, la sneaker emblématique de la culture Hip Hop est, encore une fois, la Air Force 1 ! Elle a vu le jour sur les terrains de basket en 1982, notamment aux pieds de la légende NBA Moses Malone. Après pas mal de péripéties, elle a envahi les rues du nord de New York, d’où son surnom de Uptown, et s’est imposée au sein de la sphère Hip Hop avec des collaborations et des moments forts comme l’ère Roc-A-Fella et Bad Boy, la Terror Squad de Fat Joe, le clip Air Force Ones de Nelly, le programme 1World qui a donné naissance aux éditions limitées de Booba et Pedro Winter en 2008. La AF1 transcende les générations, elle est «réapparue» aux pieds d’A$AP Rocky en 2010 et plus récemment, elle a été retravaillée par un des plus gros artistes contemporains qu’est Travis Scott.
Au fait, est-ce que tu sais depuis quand on ne dit plus basket mais sneaker pour parler des chaussures de sport ? Je me souviens même d’une époque où on disait des tennis !
En effet, les chaussures de sport étaient anciennement appelées tennis puis baskets car le tennis et le basket-ball étaient les sports les plus populaires à deux époques différentes. Selon moi, on utilise plus couramment le terme sneakers en France depuis le début des années 2000, avec la démocratisation majeure de l’industrie à l’échelle planétaire. Perso, j’utilise encore majoritairement le terme basket.
Est-ce que tu penses que la culture sneakers fait partie intégrante de la culture Hip Hop ?
Oui ! La culture sneakers fait partie intégrante de la culture Hip Hop car les baskets font partie des pièces maîtresses de notre tenue quotidienne, de notre style. Les vêtements et les baskets sont un moyen d’exprimer notre esprit Hip Hop.
On associe Run DMC à Adidas avec le modèle Superstar, est-ce que tu peux nous citer d’autres collaborations d’artistes Hip Hop avec une marque de sneakers ?
Je peux citer la collection Vans A Tribe Called Quest qui est mon groupe préféré, les Dunk Low et High De La Soul, le phénomène Yeezy avec Kanye West, les différents modèles Nike du graffiti-artist Futura 2000, les collaborations de Pharrell Williams avec adidas Originals, la fameuse Dunk Wu-Tang [rééditée en novembre 2024, ndlr] … Il y en a beaucoup.
Vans ATCQ Collection 
Dunk Low et High De La Soul 
Yeezy Kanye West 
Nike Dunk SB Low x Futura Laboratories 
adidas Originals Superstar Supercolor Pharrell Williams 
Nike Dunk High Wu Tang Clan 2024
Selon toi , comment expliques-tu que les sneakers sont devenues de véritables « objets cultes » que les collectionneurs et les passionnés peuvent payer une fortune ?
Les marques ont compris que la demande de sneakers ne cessait de croître, notamment sur les éditions limitées. Du coup, elles ont décidé de multiplier ces modèles et les clients ont suivi en faisant tout pour se les procurer, quitte à payer une fortune. Malheureusement, pour beaucoup aujourd’hui, l’objectif est d’acquérir la paire la plus limitée et onéreuse et non la paire la plus appréciée de manière personnelle. En parallèle de ce phénomène purement commercial, il y a des collectionneur·se·s et passionné·e·s qui ont les moyens d’investir dans des paires mythiques portées et/ou signées par Michael Jordan, Kanye West, etc. Et dans ce cas, il s’agit d’une dynamique équivalente à de l’investissement dans des œuvres d’art, des voitures de luxe ou encore des montres haut de gamme.
Est-ce que tu marches encore dans la rue, tête baissée pour regarder les sneakers des gens et faire un petit signe de tête pour montrer que tu apprécies la sneaker portée ?
Alors, je le faisais beaucoup avant mais ça fait un bon moment que j’ai arrêté, malheureusement, car « tout le monde » veut et porte les mêmes modèles aujourd’hui.
Tu peux nous faire le top 3 de tes sneakers préférées ?
C’est très compliqué pour moi de faire un top 3… Si je parle uniquement des modèles que je possède, je mettrais en numéro 3 la Nike Air Raid Urban Jungle – Peace blanche qui était un Graal pour moi jusqu’à ce que je parvienne à mettre la main dessus à un prix vraiment raisonnable. D’ailleurs, la semelle du pied gauche m’a récemment lâché… En numéro 2, ma Air Force 1 Low White/White signée par DJ Clark Kent, paix à son âme; Il a signé ma paire lors d’un événement que j’ai organisé au Nike Store des Champs-Elysées pour la réédition de la Air Jordan 6 Black-Infrared lors du Black Friday 2014. Et en numéro 1, je suis obligé de mettre ma cocréation, la Air Max 1 By You Culture & Diversité sortie sur le site de Nike le 19 juin 2020 !
Nike Air Force 1 – Signée par DJ Clark Kent 
Nike Air Raid Urban Jungle – Peace 
Air Max 1 by You “Culture & Diversité” – © dps prod
Cette Air Max 1 est aux couleurs du madras guadeloupéen, pourquoi as-tu eu envie de créer cette paire avec ces couleurs-là ?
J’ai fait partie des 20 lauréats du concours Nike By You Workshop début 2020 et la récompense était de cocréer une paire de Air Max avec pour thème principal notre vision d’un Paris du futur. J’ai opté pour la thématique et le nom Culture & Diversité afin de promouvoir plus d’unité au sein de la population parisienne qui est multiculturelle. En tant que guadeloupéen, antillais, afro-caribéen, j’ai choisi de m’inspirer de l’histoire et des couleurs de notre tissu madras afin de matérialiser le thème Culture & Diversité sur la paire. D’où la forte présence de rouge, jaune et vert sur l’ensemble du modèle.
Comment imagines-tu l’avenir de la sneaker ?
On vit déjà pas mal de changements au sein de l’industrie de la sneaker, notamment la disparition de pas mal de structures spécialisées dans la revente. Je pense que les consommateurs investiront des sommes moins conséquentes et à une cadence ralentie, pour j’espère revenir à une consommation plus raisonnée et raisonnable. Il y a aussi pas mal de travail à faire au niveau des paires plus éco-responsables, avec des matières éco-friendly, fabriquées dans de meilleures conditions, etc.
CULTURE BASKET-BALL
Tu es aussi un fan de basket-ball ? Quelle est ton équipe préférée ? Ton joueur préféré ?
En effet, je suis un grand fan de basket-ball en tant que sport et culture. Mon équipe préférée c’est les Los Angeles Lakers de Kobe Bryant. Mon joueur préféré n’est pas un joueur NBA mais Philip “Hot Sauce” Champion du collectif AND1 !
Comment est-ce que tu expliquerais la connexion entre culture basket-ball NBA et culture Hip Hop ? via le rap ?
Pour résumer, les joueurs de basket écoutent du rap et veulent être des artistes Hip Hop et les artistes Hip Hop jouent au basket et veulent être des basketteurs. Je parle précisément de la gent masculine. Je ne sais pas si c’est le cas pour la gent féminine.
Il y a aussi beaucoup d’événements qui mélangent match de basket-ball et concert de rap comme le Quai 54 ou basket-ball et compétition de DJing comme le Playin Paris, est-ce que tu penses que ce genre d’événement pluridisciplinaire va se multiplier à l’avenir ?
Le basket-ball est une discipline qui transcende les lignes du terrain et qui intéresse tout type d’audience donc oui, je pense que ce type d’événement pluridisciplinaire va se développer à l’avenir. J’ai moi-même mon propre concept de Block Party qui allie basket-ball, sneakers, Hip Hop et art depuis 2017 !
CULTURE & DIVERSITÉ
On en parlait au début de l’interview, ton livre s’appelle comme ta collab Nike : CULTURE & DIVERSITÉ : Hommage à mon Peyi natal, pourquoi ce titre ? Et à quoi doit-on s’attendre ?
Suite au succès unanime de ma Air Max 1 By You Culture & Diversité en 2020, j’ai organisé mon premier événement en Guadeloupe un an plus tard, afin de faire résonner le projet aux Antilles. J’ai nommé cet événement Culture & Diversité 97.1, il s’agissait d’une semaine complète dédiée à la valorisation et la transmission des cultures afro-caribéennes avec notamment une exposition de sneakers de ma collection personnelle, un podcast sur les notions de passion et business, une performance artistique de jeunes artistes locaux, une performance gwoka qui est un art musical traditionnel. L’événement a été une expérience humaine extrêmement riche et c’est vraiment les innombrables retours positifs que j’ai reçu sur place qui m’ont inspiré pour écrire ce livre.
crédit photo © mwakart_visual
À quoi s’attendre ? À découvrir une œuvre littéraire et visuelle de qualité, tant sur la forme que sur le fond, qui retrace l’aventure Culture & Diversité avec des notions clés que sont l’héritage familial, la valorisation et la transmission des cultures afro-caribéennes, la passion, le partage, l’unité ou encore l’entrepreneuriat. Le tout, dans une dynamique positive, fédératrice et élévatrice !
Est-ce que tu parles aussi de la culture Hip Hop en Guadeloupe ? Tu peux nous citer des artistes guadeloupéens qui sont encore Hip Hop selon toi ?
Je n’aborde pas le sujet de la culture Hip Hop en Guadeloupe mais je parle d’un collectif très actif dans la culture sneaker locale : big up à Sneakers Heads FWI ! Je me permets d’élargir ta question dans ma réponse, en citant trois artistes antillais qui sont encore Hip Hop selon moi : Kalash, Meryl et Keros-N.
Avec la crise actuelle en Guadeloupe et en Martinique est-ce que tu penses que c’est devenu d’autant plus important de rendre hommage à notre héritage et nos racines antillaises ?
Je pense que rendre hommage à nos racines et notre héritage afro-caribéen est fondamental, pendant et hors période de crise, sachant que les problèmes soulevés actuellement ne datent pas d’hier. Il est important d’être fiers de notre histoire et de notre patrimoine pour notre bien-être personnel et celui des générations à venir.
Qu’est-ce que tu peux dire aux lecteurs de T-Rexmagazine pour les inciter à acheter ton livre ?
CULTURE & DIVERSITÉ : Hommage à mon Peyi natal est bien plus qu’un simple livre. C’est une aventure, une expérience humaine riche en savoir, en partage et en couleurs, qui a vocation à inspirer chaque lectrice et lecteur. Avec cet ouvrage, mon but est vraiment d’inciter chacun d’entre nous à faire ce qu’on aime, avec authenticité, pour le bien de tou·te·s. Faisons en sorte d’atteindre l’objectif du crowdfunding ensemble afin de pouvoir organiser un maximum d’événements promo à Paris, dans le reste de l’Hexagone et aux Antilles. Je compte sur votre contribution !
crédit photo © jeffryjunes
Un dernier mot pour la fin ? Une dédicace ?
J’ai à cœur de clore cet article en remerciant ma maman qui m’a transmis son amour pour la culture, la lecture et l’écriture. Sans elle, je n’aurais sûrement pas eu pour projet d’écrire un livre un jour. Avant d’être un hommage à mon Peyi natal, CULTURE & DIVERSITÉ est un hommage à cette femme exceptionnelle qu’est ma maman.
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Il présentera sa nouvelle exposition « Paris Sneaker Exhibition » lors du Paris Sneaker Festival le 9 novembre 2024
